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Pokémon Rouge Feu – Vert Feuille

Le

par

La GameBoy Advance, qualifiée par certains de « Super Nintendo portable », a autant brillé par ses jeux originaux que par la quantité importante de remakes ou de portages qu’elle a accueillie. Si certains montraient une belle économie de moyens et semblaient directement issus de leur version d’origine sans modification (tous les Super Mario Advance ou encore la série des NES Classics), d’autres faisaient l’effort d’apporter une vraie remise au goût du jour de jeux auxquels le temps n’avait pas fait que du bien.
Ainsi, à côté de Metroid Zero Mission, par exemple, se trouvent les deux versions complémentaires Pokémon Rouge Feu et Vert Feuille, remakes des toutes premières (et indétrônables) versions Rouge et Bleu sur GameBoy. C’est ici que commence la série des remakes de la saga Pokémon, qui en est aujourd’hui à sa troisième vague avec Rubis Oméga et Saphir Alpha. Alors, Rouge Feu et Vert Feuille, simples suceurs de porte-monnaies ou vrais apports à la série ?

Il était une fois…

De quoi parlons-nous ici ? Du remake des toutes premières versions de Pokémon, sorties il y a déjà 18 ans (!!!) au Japon, et 14 ans (…) chez nous. Le fondement même de la série, donc, celui par qui la folie Pokémon a déferlé sur le monde. Les versions originelles japonaises Rouge et Verte (le vert étant devenu bleu en Europe) restent toujours à ce jour le seul jeu s’étant vendu à plus de 10 millions d’exemplaires dans l’archipel nippon. Et au niveau mondial, la première génération de jeux Pokémon est toujours la cinquième meilleure vente vidéoludique de tous les temps, avec plus de 31 millions d’exemplaires écoulés. Plus qu’un jeu, un phénomène de mode, une folie mondiale comme rarement la culture japonaise en a accouché.


La raison d’être du remake pourrait alors paraître superflue : ce serait omettre le pognon monstrueux que cette licence rapporte ! Mais ce serait aussi omettre que les versions originales, bien que riches par leur système de jeu et leur univers, étaient pauvres sur le plan graphique et sonore. Un jeu GameBoy vieillit vite, très vite. En 2002, Nintendo en est à sa troisième génération de bestioles avec Rubis et Saphir : comment attirer les jeunes joueurs, découvrant la série par cette troisième génération, vers les épisodes précédents dont le style déjà suranné peut rebuter ? En proposant des versions remises au goût du jour, évidemment. Et puis, comment proposer aux possesseurs de Rubis et Saphir de compléter un Pokédex à rallonge, alors que la GameBoy Advance n’est plus compatible avec son ancêtre ? La réponse tient également dans les remakes.

Pour toutes ces raisons, voilà donc que débarquent en 2004 les versions Rouge Feu et Vert Feuille !

C’est le moment de choisir : la nostalgie me pousse à me tourner vers Carapuce, le seul, l’unique. Celui que j’avais pris dans ma toute première partie de Pokémon Bleu…

Ravalement de façade total…

Le but de ces remakes consiste donc à remettre à neuf les fondations de la série, tout en les préservant au maximum : un exercice d’équilibriste qui consiste à tout changer sans rien dénaturer. Et le pari est réussi ! L’écart que l’on mesure le plus facilement est l’écart graphique : Rouge Feu et Vert Feuille utilise le moteur graphique léché de Rubis et Saphir pour transformer Kanto, la région du jeu, en un environnement sublime. Là où, autrefois, on avait des aplats de texture similaires d’un lieu à l’autre, on trouve désormais des détails permettant de clairement identifier chaque lieu, chaque zone traversée. Quel plaisir de découvrir les 150 premiers Pokémon (les seuls, les vrais) au travers de sprites remis au propre !


Désormais, l’entrée dans un lieu donne droit à une petite image d’ambiance avant d’attaquer l’exploration : très efficace pour donner le ton de la zone !

Et quelle joie de redécouvrir les thèmes musicaux originaux dans des réarrangements bien plus riches qu’auparavant ! Les musiques des premières versions ont beau s’être gravées dans ma tête après les centaines d’heures d’écoute que j’ai endurées, il faut bien avouer qu’elles n’ont rien d’objectivement agréables. Elles sont très évocatrices, mais elles souffrent de la pauvreté sonore de la GameBoy de l’époque. Sa descendante, la GameBoy Advance, qui n’est pourtant pas une référence indiscutable en terme de chipset sonore, nous livre pourtant un résultat très agréable avec ces remakes, quoiqu’en dents de scie. Certains réarrangements donnent un résultat vraiment au-dessus de l’original, en terme de richesse et d’intensité, tandis que d’autres rajoutent inutilement des effets qui peuvent alourdir le rendu final. Mais cela relève de l’appréciation personnelle, dans le fond !

Ronflex, toujours là, et toujours disproportionné par rapport à vous !

Petit comparatif graphique et audio !

Pokémon Rouge et Bleu – Route 1.
Une mélodie et une ligne de basse qui se grave dans votre tête en 30 secondes.
Pokémon Rouge Feu et Vert Feuille – Route 1.
Tempo plus lent, plein de pistes superposées avec sifflements et impression de se balader avec les 7 nains.

Pokémon Rouge et Bleu – Champion d’arène.
Musique stridente et stressante, rythme appuyé (et cris de Pokémon en bonus !)
Pokémon Rouge Feu et Vert Feuille – Champion d’arène.
Tempo plus rapide, concert de trompettes et batteur fou.

… Mais architecture de la façade inchangée ! Ou presque.

Tout le paradoxe et la réussite du jeu tient dans le fait qu’à côté de ces grandes améliorations graphiques et sonores, le cœur du jeu, son essence même, n’a pas été changé d’un iota. Vous êtes toujours un jeune dresseur de Pokémon partant à travers champs pour capturer le maximum de bestioles possible et devenir Maître Pokémon en battant les meilleurs dresseurs du continent. Vous avancez de ville en ville, entrainez votre équipe, battez les méchants de la Team Rocket qui veulent conquérir le monde. Votre rival désagréable est toujours là et fait mieux que tout le monde, les lieux n’ont pas bougé… Et les dialogues sont retranscrits à l’identique, au mot près la plupart du temps ! Une véritable aubaine pour tout le monde : le jeune joueur découvre le jeu tel qu’il a été pensé à la base, le vieux joueur chevronné redécouvre un jeu qu’il connaît déjà par cœur.

Avec une seule marche de podium, on ne peut qu’être premier. Bravo Ondine, bel esprit.

Enfin, tout n’est quand même pas reporté à l’identique, car Rouge Feu et Vert Feuille prennent à Rubis et Saphir toutes les améliorations introduites par la troisième génération, tout en allant parfois même plus loin ! On retrouve donc le système de stockage de Pokémon idéal de Rubis et Saphir, mais aussi les chaussures de sport pour courir (indispensable), ou encore les capacités spéciales des Pokémon, les changements de type ou d’effets de certaines attaques, etc. Les combats en double, bien moins présents que dans Rubis et Saphir, sont pourtant toujours là.

D’autres aspects introduits par Rubis et Saphir n’ont pas été retenus, en revanche : les Concours Pokémon n’ont pas été implantés, et les baies se font bien plus rares, ne poussant plus sur des arbres à replanter mais se cachant à même le sol… Le sac d’objets, encore remanié, affiche désormais un visuel de l’objet sélectionné (on sait enfin à quoi ressemble une Pierre Feu, par exemple), et stocke les CT/CS et les baies dans des boîtes à part.

Les CT/CS, parlons-en ! Elles sont identiques à celles de Rubis et Saphir : la répartition originelle des CT/CS comme dans Rouge et Bleu a donc disparu… mais pas les attaques ! Pour remplacer ces attaques disparues, vous trouverez dans le jeu de nombreuses personnes susceptibles d’enseigner ces vieilles attaques à vos Pokémon ! Malin. De plus, les deuxième et troisième générations ayant introduit de nombreuses nouvelles attaques, on redécouvre avec plaisir l’apprentissage de nouvelles capacités par nos bestioles, et le ré-équilibrage général nécessaire à la série : les Pokémon Spectre ont enfin des attaques Spectre utiles ! Toutes ces améliorations permettent de reprendre en main un jeu pourtant bien connu, et de faire naître de nouvelles stratégies.

Là, devant moi, il y a une baie cachée. Oui, regardez bien, ça fait comme une tâche…
Les décors gagnent en richesse : ici, on se sent encore plus dans une grotte qu’auparavant !

Autre nouveauté très intéressante : le Cherche VS, permettant de combattre à nouveau les dresseurs qui le souhaitent, et ce quand on veut. On monte donc encore un cran par rapport aux épisodes précédents : quelques dresseurs à combattre à nouveau dans Or / Argent, mais seulement quand ils voulaient bien, puis des dizaines de dresseurs disponibles dans Rubis / Saphir, mais encore une fois selon leur bon vouloir. Ici, l’objet qui se recharge tous les 100 pas vous permet de déclencher l’envie de combattre pour les dresseurs à proximité, et cela indéfiniment ! De quoi s’entrainer sérieusement avant d’affronter une arène !

Enfin, pour ne perdre personne en route, le jeu dispose d’une aide affichable à chaque instant, qui détaille tous les aspects du jeu, jusqu’au tableau de faiblesse et résistance des types de Pokémon : de quoi appréhender sereinement la série quand on est un nouveau joueur. De même, à chaque allumage du jeu, vous aurez droit à un flash-back en noir et blanc de vos précédentes actions importantes : pratique pour vous y remettre si vous jouez une fois par mois, lourd si vous jouez plusieurs fois par jour.

Le Cherche VS en action ! Dans une seconde, vous saurez si les dresseurs à l’écran veulent combattre ou non !
Ah oui, un sac avec des poches, parce que sans poche, c’est moins pratique.

Et derrière la façade, surprise : de nouvelles pièces !

Le jeu aurait pu en rester là, et ne proposer que des améliorations dans l’air du temps, en se cantonnant à une relecture bête et méchante de l’original. Ainsi, l’aventure se déroule sans surprise jusqu’à l’obtention du 7ème badge, à Cramois’Île. C’est après cette 7ème arène que le jeu prend un tournant totalement inédit, trompant son monde et apportant quelque chose que ni le joueur nostalgique de 30 ans, ni le petit nouveau de 12 ans ne connaissent !

Ainsi, voilà que Léo, créateur du système de stockage informatique des Pokémon, vous convie sur de mystérieuses îles, les îles Sevii, pour l’aider à régler différents soucis de serveur. Derrière ce ressort scénaristique se cache en réalité la possibilité de débloquer les échanges avec les versions Rubis et Saphir, habilement camouflée derrière une quête assez longue et bien menée. Et il n’y a pas que ça à faire, sur les îles Sevii ! Après un premier passage par les trois premières îles, le jeu reprend son cours classique et vous mène jusqu’à la ligue Pokémon. Vous terminez le jeu, vous vous apprêtez à compléter votre Pokédex… et voilà que s’ouvrent à vous de nouvelles îles ! Mieux, le professeur Chen vous informe que des Pokémon inconnus à Kanto ont été observés un peu partout, et que votre Pokédex et loin d’être complet ! Et c’est reparti pour un tour : de nouvelles mini-quêtes vous attendent sur les îles Sevii, où la Team Rocket trame de nouveaux complots. De nombreux Pokémon de Johto (le continent de Or / Argent) n’attendent qu’à être capturés, de nouveaux mystères s’offrent à vous… En plus des 7 îles classiques directement accessibles, 2 autres îles cachées renfermant nombre de Pokémon légendaires ne seront accessibles qu’après obtention d’un pass spécial délivré par Nintendo… On commence à avoir l’habitude de ce genre de magouilles.

La couleur de l’attaque change si vous manquez de Point de Pouvoir (PP) : vous savez en un clin d’œil si vous êtes large ou s’il faut se refaire une santé !
Deux des sept îles Sevii accessibles dans le jeu.

C’est donc tout un pan scénaristique nouveau qui vient se greffer sur le déroulement classique de l’histoire, et qui s’y greffe plutôt bien. Le tout est bien emmené et permet d’avoir une vraie nouveauté dans des jeux que les plus vieux connaissent normalement par cœur. Une très bonne chose qui contente tout le monde !


Le Pokédex gagne en clarté et vous permet de trier les Pokémon par habitat : inutile mais rigolo !
Les combats 2 VS 2 sont toujours de la partie !

Jeu garanti sans câble Wifi !

Une dernière petite chose qui a son importance : ces versions étaient vendues avec un adaptateur sans fil de toute beauté (et absolument discret) qui venait de connecter sur le haut de votre GBA, en lieu et place du classique câble Link utilisé jusqu’alors. Rouge Feu et Vert Feuille sont ainsi les seuls jeux, parmi la vingtaine compatible avec le bouzin, ayant été distribués en bundle avec. Une amélioration drastique du port infrarouge de la GameBoy Color, mais surtout une préfiguration de la connexion sans fil qui s’est imposée avec le Wifi intégré de la DS, quelques années plus tard. Ainsi, Rouge Feu et Vert Feuille insistent bien, dans le scénario même, sur les possibilités d’échanges sans fil et de mini-jeux à faire avec ses potes. Pas inoubliable, mais une initiative à rappeler malgré tout.

Elle a fière allure avec son chapeau, non ?

En bref…

Il est temps de dresser un petit bilan du jeu !

J’aime :

  • Redécouvrir Kanto sous ses meilleurs angles
  • L’ambiance mémorable des originaux est toujours là
  • Les Pokémon sont enfin ré-équilibrés !
  • Les îles Sevii, sympathiques à explorer
  • La durée de vie toujours impressionnante

J’aime pas :

  • Mon rival
  • Certaines musiques qui en rajoutent inutilement
  • Et pas grand-chose d’autre…

Pokémon Rouge Feu et Vert Feuille sont d’excellents remakes : ils tirent le meilleur des jeux originaux et de tous les apports ultérieurs de la série pour sublimer l’aventure fondatrice de la saga et la rendre accessible à tous. La réussite du jeu tient dans le fait que tout le monde y trouve son compte : le jeune joueur découvre les fondements de Pokémon dans un épisode très agréable à jouer et compatible avec les autres versions de l’époque, le vieux joueur chevronné retrouve avec nostalgie tout le sel d’autrefois, tout en étant agréablement surpris par les ajouts modernes. C’est une réussite : Rouge Feu et Vert Feuille ont tout pour plaire au plus grand nombre.

Mon équipe de vainqueurs !