Il arrive parfois que des suites de jeux vidéo arrivent alors qu’on ne les attendait plus. C’est le cas de Golden Sun DS, suite des deux meilleurs RPG de la Game Boy Advance. Grosse surprise d’un E3 2009 vachement fade, le jeu a ravivé la flamme des adeptes de l’alchimie façon Nintendo. Pour certains (moi le premier) un peu trop. En valait-il la chandelle ?
Trente ans après…
Pour pouvoir continuer la saga avec de nouveaux mystères, c’est un peu banalement qu’on nous sert le coup de l’ellipse temporaire. Et dans le genre marseille, elle remporte la palme de Cannes puisqu’il s’écoule 30 ans entre le jeu GBA et cette suite.
Dans Golden Sun : L’Âge perdu, le soleil d’or s’est donc levé et a sauvé le monde d’une destruction certes lente, mais certaine. Tout ça grâce aux efforts communs de Vlad, son équipe et celle de Pavel. Jusque là tout va bien, rien de nouveau sous le soleil. Enfin… Trente ans après les événements des deux opus, Obscure Aurore nous introduit un tout nouveau monde, à la géographie totalement chamboulée. La faute au soleil d’or, qui a fait à nouveau déferler l’alchimie sur le monde mourant. Ressuscité, Weyard s’est donc transformé géographiquement : montagnes, mers, villes, etc., rien n’est plus comme avant. Et le pire dans tout ça : des vortex qui aspirent la psynergie ont apparu un peu partout, saccageant des villages et régions entiers.
Nos héros dans tout ça, sont les fils des héros précédents. Matt est le fils de Vlad, Kiara la fille d’Ivan, et Terry celui de Garett. Cette ribambelle de jeunesse a pour mission de trouver une plume spéciale pour réparer un deltaplane spécial construit justement pour étudier ce phénomène étrange que sont les vortex à psynergie. C’est déjà moins glamour que de savoir qu’on doit sauver le monde dès le départ (même si c’est ce qui se passe après).
L’aventure débute, on découvre les conséquences qu’a eues le soleil d’or sur la population de l’univers du jeu et sur les continents. Pour un joueur invétéré des autres épisodes, difficile de savoir ce qu’est devenu le continent de Gondowan, celui d’Océania ou même d’Indra. Heureusement, les développeurs et scénaristes ont pensé aux fans de la première heures et ont placé de nombreuses références directes ou indirectes à la quête des phares élémentaires de Vlad et ses potos. La carte nostalgie jouée à fond, ça fait plaisir (mais pas toujours) !
Mais le truc le plus fou dans tout ça, c’est qu’on ne dirait pas que la transition entre les trente ans a été prévue convenablement par les scénaristes. Même si de nombreuses références aux précédents épisodes apparaissent forcément, c’est ce qui n’est jamais apparu dans les jeux auparavant qui pose problème. On a vraiment l’impression que travail a été fait à moitié au niveau des scénaristes. Pourtant, à écouter Hiroyuki Takahashi, interviewé en 2012 par le magazine Nintendo Gamer, ça a vraiment été un boulot de DINGUE :
Un RPG, ça prend beaucoup de temps et d’effort. Et si vous avez joué au jeu, vous aurez remarqué que le nombre d’idées incluses dans l’histoire était assez grand. Quand j’écris une histoire pour un jeu Golden Sun, j’y mets toute mon âme et lorsque je la finis je me sens vidé.
Ah ouais, d’accord. Mais alors, comment expliquer pourquoi toute les nouvelles civilisations et les artefacts qui vont avec, tous les nouveaux temples apparus à la surface de la Terre depuis le soleil d’or, n’avaient jamais été évoqués avant ? C’est bien d’apporter une histoire plus dense à son jeu, mais si y a pas de cohérence ça ne prend pas. Dans ce Golden Sun, il n’y a aucune explication quant à comment sont apparues ces civilisations ANTIQUES (pas en trente ans quand même…), pourquoi elles deviennent si importantes maintenant ? C’est LE gros trou scénaristique du jeu. Un trou qu’il est possible de combler. Mais à priori ça va pas se faire aussi facilement. Il faut déjà penser à la suite du jeu. La fin de Obscure Aurore arrive avec un immense coup de théâtre et indique clairement qu’il peut y avoir une suite.
Problème : cette suite ne verra le jour seulement si les ventes sont là. Et ce sera seulement à ce moment que les équipes pourront commencer à bosser à nouveau sur le projet et le monde. Mais pour l’instant on n’a pas trop l’impression qu’ils savent où aller avec toutes ces nouveautés : « Il faudra me donner un peu de temps pour avoir suffisamment d’idées pour l’histoire avant de sortir un quatrième jeu« . Bah ouais mon coco, mais ‘faudrait aussi penser à expliquer certaines situations, non ? On dirait que contrairement aux opus GBA, les développeurs n’ont pas du tout prévu leur scénario sur deux jeux. Enfin j’ose espérer que c’est le cas mais qu’ils font du teasing inutile en attendant d’avoir le feu vert pour le 4ème épisode, parce que ça serait vachement ridicule…
Et je ne commence à peine à parler du personnage d’Alex, récurrent dans les deux premiers opus, qui revient dans celui-ci pour faire chier son monde. Mais on ne sait toujours pas ce qu’il a foutu pendant ces 30 ans, quel est son nouveau but, RIEN.
Le chant du cygne graphique
Dernier grand jeu au long cours de la DS, les développeurs ont tout fait pour montrer qu’ils savaient manier la bête et lui faire cracher tout ce qu’elle avait dans le ventre. En ce qui me concerne c’est l’un des plus beaux jeux de la DS. Loin devant les petits pixels en SD de Final Fantasy III, notamment, qui n’étaient paaas si moches que ça en dehors des personnages. D’ailleurs, commençons par-là, puisque c’est un peu au même endroit que ça pêche, mais dans des proportions moindres. Bien que pas encore totalement transformés en héros miniatures et déformés par la SD et son petit côté “chibi”, les personnages de ce Golden Sun ont a peu de choses près la même modélisation que pour FF3. En tout cas à l’œil, on ne voit pas une différence flagrante.
A l’époque de l’annonce de la sortie du jeu, la différence on l’avait vue entre deux trailers de Obscure Aurore et de Kid Icarus : Uprising (qui a quand même mis 3 ans pour sortir). Ouais parce que bon, je viens de dire que les graph’s de ce Golden Sun étaient top, face à ceux de la 3DS, y avait même plus à lutter. K.O. par manque de polygones.
Bon, à part cet interlude venu de nulle part juste pour remplir cette laborieuse partie, revenons un peu à nos moutons de pixels. Passer de la fabuleuse Game Boy Advance et ses graphismes souvent loin d’être laids à la DS, forcément il fallait passer le cap de la vraie 3D. Le changement est tel qu’en fait on regrette un peu la 2D sympathique et attachante des premiers opus. Surtout lorsqu’on se rend compte que c’est uniquement l’écran inférieur, le tactile, de la console qui est utilisé, alors que la fonction tactile est discutable, l’utilisation de l’écran supérieur pour afficher le jeu aurait pu être un choix nettement meilleur. Heureusement, c’est très joli au fond ! Les décors scintillent, sont pleins de détails, etc. Les combats sont bien animés et les invocations sont vraiment superbes (elles s’étalent d’ailleurs sur les 2 écrans). Mais il ne faut pas se leurrer : entre les graphismes de Golden Sun GBA et ceux de Golden Sun DS, j’ai rapidement fait mon choix.
C’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes
(Mais si tu ne décrasses pas le pot assez souvent ta soupe est carrément dégueulasse !)
On ne va pas y aller par quatre chemin : dès ses débuts, Golden Sun n’était pas une série qui s’illustrait par la modernité de son gameplay. En dehors du système des djinns qui était très bien pensé à l’époque et qui offrait tout de même un peu d’originalité dans le déroulement des combats, on ne peut pas dire que le tour par tour soit l’exemple même du gameplay dynamique. Du coup Camelot a n’a pas vraiment décidé de renouveler son système si efficace il y a 10 ans : on prend les mêmes et on recommence. A croire qu’ils ont épuisé tout leur budget « brainstorming » dans le scénario et les graphismes et qu’ils ont oublié le gameplay. Du coup, on a affaire à un cruel manque d’inventivité : l’essentiel de ce qui a fait le bonheur des deux premiers opus est de retour, les djinns sont toujours là, les psynergies n’ont que peu évolué mais heureusement quelques nouvelles se sont glissées dans le jeu, qui servent aussi bien en combat que dans le gameplay. Idem, on peut toujours s’amuser à lier différents djinns élémentaires à un même personnage pour lui attribuer une toute nouvelle classe et des psynergies différentes.
Ce qui fait que le système de jeu, qui n’apportait déjà pas grand chose à l’époque, prend un grand coup de vieux : la recette est la même depuis les premiers jours du RPG japonais et face à d’autres jeux vidéo qui ont opté pour quelques petites révolutions dans leur système de combat, Golden Sun reste figé dans le passé. En dehors des boss parfois chiants, souvent faciles à battre, les combats sont d’un ennui incroyable : à partir d’un moment, les pauvres monstres qu’on rencontre sont battus en moins de 20 secondes, il suffit simplement de faire des attaques simples. Alors oui, c’est foutrement efficace, surtout que c’est pas bien dur de copier la même recette que les épisodes GBA, mais pour une suite qui a mis plus de 6 ans à arriver, il fallait peut-être élever les choses.
Sans parler des puzzles et des énigmes qui ont tout simplement l’air d’être le fruit d’une ficelle épuisée jusqu’à la moelle, des souvenirs de ce à quoi les développeurs nous avaient déjà habitués à la dernière décennie. L’agencement des donjons pourrait trouver son identique dans les anciens jeux, les énigmes reprennent les mêmes mécaniques et malgré l’apport de nouvelles psynergies et de l’écran tactile (dont on aurait pu se passer en réalité), ça reste du réchauffage. Heureusement que la carte nostalgie est là pour faire le boulot, surtout que dans l’ensemble ces énigmes sont tout de même trèèèès faciles à résoudre à l’exception de quelques unes parfois corsées si on oublie qu’il existe une psynergie capable de nous dire comment résoudre ce casse-tête.
Musicalement, c’est pareil. Contrairement à sa réputation proclamée par moi-même pour son incroyable travail sur les Baten Kaitos, Motoi Sakuraba nous laisse un peu tomber. Comme pour de nombreux autres points, on sent que le Motoi a des problèmes d’inspirations : ses compositions ressemblent à du recyclage d’autres jeux, quand le reste n’est pas tout simplement une réorchestration des morceaux emblématiques des premiers Golden Sun. Les seules compositions qui vaillent vraiment la peine sont les remixes des morceaux emblématiques des version GBA. Elles font (bien) le boulot, c’est tout. Au final, la nouvelle version du thème principal de Golden Sun n’est pas trop retravaillée. En revanche, mention spéciale au thème de combat de Salamandar qui a fait peau neuve d’une très belle façon (LES CLOCHES NOM DE DIEU).
Plutôt une fois que deux
Ce qui est con avec certains jeux, c’est qu’on juge parfois leur durée de vie sur la probabilité qu’on y rejoue ou non. En l’occurrence, à part pour voir si je ne suis pas trop méchant avec ce Golden Sun, je n’ai à peu près aucune envie d’y rejouer. Bon, j’avoue, je l’ai commandé histoire d’y rejouer et d’être sûr de pas raconter trop de conneries dans ce test. Du coup malgré mes prises de tête avec le scénario et la facilité du jeu, j’ai plutôt aimé. Mais contrairement à ses prédécesseurs, dont l’envie d’y rejouer me revient de temps en temps, je ne suis pas sûr de le recommencer une nouvelle fois. Et ceux-là je les ai parcourus en long et en large plus de 3 fois. En ce sens, Obscure Aurore ne me donne absolument pas envie d’y retoucher. Les personnages ne sont pas incroyables, le scénario est insipide et incohérent, le système de jeu usé jusqu’à l’os de la moelle. Fichtre !
Heureusement, une fois qu’on est dedans, si c’est la première fois qu’on y joue et qu’on a été fan des premiers opus, le jeu se termine tranquillement. Il dispose d’une vraie durée de vie, entre la vingtaine et la trentaine d’heures de jeu, à peu près au même niveau qu’un RPG japonais actuel. C’est même étonnant vu qu’on est sur un jeu portable (bien sûr si on fait du « speedrun » ça passe déjà plus rapidement). Il y a quelques quêtes annexes qui rallongent cette expérience, sans parler des éternels djinns qu’il faut aller chercher dans tous les coins du monde, à pied, en bateau, etc. Et comme dans Golden Sun : L’âge perdu, il y en a un paquet (72 et il y a 14 tablettes d’invocations à trouver si vous souhaitez débloquer toute une débauche de puissance dévastatrice) !
J’aime :
- Les graphismes mignons qui font honneur à la DS en fin de vie
- Le système de combat inchangé
- Les remixes de morceaux des anciens Golden Sun
- Le monde assez étendu et explorable
- Les Djinns et les invocations en 3D !
- La carte nostalgie jouée à fond (mais vraiment à fond)
J’aime pas :
- Le scénario incohérent et niais
- Le manque de renouvellement dans le gameplay
- Le manque de renouvellement et d’inventivité dans les énigmes
- Les énigmes VRAIMENT simples
- Des personnages pas très intéressants
- Le cliffhanger de fin qui ne sert à rien à part faire espérer une suite histoire de boucler la boucle…
- Le manque d’inventivité global du jeu (musiques en particulier)
- Vachement facile
En tant que fan absolu des épisodes GBA, j’attendais cette suite comme le messie de la DS. Peut-être que je n’aurais pas dû ; ou peut-être que Nintendo et Camelot n’auraient jamais dû sortir cette suite. Je n’ai jamais retrouvé le même fun que lorsque je jouais et rejouais aux autres Golden Sun. La carte nostalgie et les qualités du jeu (oui il y en a quand même) m’ont permis de l’apprécier malgré tout, mais tout le reste des défauts vient un peu ternir ce bilan dans mon cœur. Golden Sun 1 & 2 forever. D’ailleurs, je pense que je vais ressortir mes cartouches.