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Pokémon Trading Card Game

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par

Fin des années 90. Les Pokémon ont déferlé sur le monde, et avec eux, une cargaison incommensurable de produits dérivés. Parmi ces produits dérivés, le jeu de cartes Pokémon, permettant de ravir autant les collectionneurs que les joueurs. Devant le succès du jeu, comme tout ce qui était estampillé Nintendo, il ne fallut pas attendre longtemps avant de voir arriver… un jeu vidéo tiré du jeu de cartes. Tiré du jeu vidéo.

Je n’ai pas eu ce jeu étant petit. Tout mordu de Pokémon que j’étais du haut de mes 10 ou 11 ans, j’avais mes limites. Mes parents, déjà saignés à blanc par l’achat des versions Rouge, Bleu, Jaune, de l’album Panini complété jusqu’à la fin, des cartes à jouer et à collectionner, et bientôt mis à terre par l’achat futur des versions Or, Argent, Cristal, Pinball, n’auraient pas pu supporter ça. Proche de la monomanie, cette passion allait s’avérer un gouffre financier. Gouffre dont je prends aujourd’hui conscience de l’ampleur.

Pas question pour moi de leur demander ENCORE un jeu Pokémon, qui plus est tiré du jeu de cartes que je les forçais à acheter de temps en temps en magasin de journaux. J’étais fou, mais pas à ce point. D’ailleurs, quand ma mère me demandait, à chaque achat, si j’avais eu de nouvelles cartes, je répondais timidement que oui, bien entendu, pas toutes bien sûr, mais trois ou quatre, c’est déjà pas mal. Quand bien même toutes les cartes du paquet étaient en ma possession.


Ces cartes, elles se vendaient, et se vendent encore, chez les marchands de journaux et autres revendeurs. C’était un petit trésor, pour moi. Déjà parce que, résidant en rase campagne, elles étaient rares, et toutes les magasins n’en possédaient pas. Mais aussi parce qu’elles apportaient une dimension nouvelle au jeu que je connaissais déjà par cœur. J’ai toujours été plus collectionneur que joueur, concernant ces cartes. Je ne comprenais pas l’intérêt d’avoir des dizaines de Rattata dans mon « deck » de cartes (paquet, en français). Moi, je voulais les avoir toutes. Je n’ai jamais réussi.

Peu de gens jouaient autour de moi. On échangeait, mais on ne jouait pas. Lors d’un Noël, j’ai eu un deck Starter, comme on disait, contenant des jetons, un plateau de jeu (en fait, un poster dépliable) et autres cartes rares. Avec mon petit frère, nous avons bien tenté de jouer selon les vraies règles, mais le jeu tournait vite en rond. Mais, d’ailleurs, posons les bases du jeu avant d’aller plus avant.

Les règles (compliquées) du jeu

Le jeu se joue avec un deck de 60 cartes par joueur. Au début du jeu, chacun pioche 7 cartes et pose face à lui, sur son « banc », les éventuels Pokémon de base (non évolués) qu’ils tirent. L’un de ces Pokémon deviendra le Pokémon actif, soit celui qui se bat, les autres restants sur le banc à compter les coups. Puis, les joueurs placent sur le terrain des récompenses, face cachée, c’est-à-dire des cartes de leur deck qu’ils auront le droit de récupérer chaque fois qu’ils mettront KO un Pokémon adverse.

Après tirage au sort à pile ou face pour désigner qui commence, le premier joueur pioche une carte, et il en sera ainsi au début de chaque tour. Lors d’un tour, le joueur peut jouer des cartes de sa main, mais aussi et surtout attaquer l’adversaire. L’attaque signe le passage de la main à l’adversaire, et donc la fin du tour du joueur. Mais ! Pour attaquer, un Pokémon doit être pourvu de cartes spéciales : des cartes Énergie. Ainsi, une fois par tour, un Pokémon peut se voir attribuer (on dit « attacher ») une carte Énergie. Chaque attaque requiert un certain nombre de ces cartes Énergie. Parfois, il faudra même les défausser en cas d’attaque, donc s’en séparer pour le reste de la partie. Les cartes Énergie possèdent un type, comme les Pokémon. Notons que les types ne sont, dans le jeu de cartes, qu’au nombre de 7 : Incolore (qui remplace Normal et Vol), Feu, Plante (qui remplace aussi Poison et Insecte), Eau (qui remplace aussi Glace et Dragon), Psy (qui remplace aussi Spectre), Combat (qui remplace aussi Sol et Roche) et Electrik. Il faut en tenir compte pour calculer les faiblesses et les résistances des Pokémon face aux attaques adverses, mais aussi en tenir compte pour attaquer. Car les attaques nécessitent d’avoir attaché un certain nombre de cartes Énergie du bon type… Mais pas toutes, donc ça dépend, faut voir.


Mais avant d’attaquer, vous pouvez utiliser les cartes Dresseur, qui ont des effets divers (piocher des cartes, en jeter, pénaliser l’adversaire, soigner votre équipe, etc.), ou bien faire évoluer vos Pokémon, si vous possédez bien sûr la carte à l’avenant. Vous attaquez, vous placez sur la carte adverse des marqueurs de dégâts (jetons) indiquant le nombre de coups qu’il a reçu, vous tirez des pièces en cas de changement de statut, ou bien si votre attaque le demande, et votre tour et fini ! Si vous voulez échanger votre Pokémon actif avec un de votre banc, prenez garde, car les plus forts nécessitent, pour être rappelés, de défausser une ou plusieurs cartes Énergie attachées !

Bon… Une pause, un Doliprane, et on reprend. Ces règles sont COMPLEXES. Elles le sont beaucoup trop à mon goût. Ce jeu de cartes a été joué et l’est toujours en tournoi, par ce que je considère comme des acharnés, car, tout penauds que nous étions mon frère et moi, nous n’avons jamais réussi à aller très loin dans cette pratique. Le jeu se révèle très riche, un peu trop, et les règles, pour être assimilées, doivent être mises à l’épreuve plusieurs fois. Je ne suis pas un adepte des jeux trop complexes : les jeux les plus drôles et les plus récréatifs pour moi ont souvent été les plus faciles d’accès. Or, celui-ci ne l’est qu’après des dizaines de parties, et encore, si les mécanismes sont bien assimilés, et si les decks sont bien construits.

Un monde sans ville ni village, et un laboratoire qui en rappelle un autre.

Et sinon, le jeu vidéo ?

J’y viens. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que le jeu dont il est question ici suit à la lettre les règles du jeu de cartes, en toute logique. En bon produit dérivé, il peut aussi faire office de version d’apprentissage ou d’entraînement. On joue donc ici des parties de cartes virtuelles selon les règles ci-dessus, avec des cartes virtuelles glanées dans un monde réduit à sa plus simple expression (une carte du monde avec 10 maisons, des arènes de combat, accessibles dès le début du jeu, sans zones ou routes intermédiaires). Débarqué dans le monde et affublé d’un deck sans autre forme de procès, vous comprendrez vite que vous allez devoir battre les 8 maîtres dispersés dans le monde pour accéder au Dôme Pokémon au centre de la carte et ainsi finir le jeu. En battant des adversaires, vous gagnerez des boosters de cartes, soit les paquets que j’achetais chez mon marchand de journaux. De quoi améliorer votre deck ou en créer un nouveau à partir de rien.

Dites, je peux pas choisir un vrai Pokémon au lieu d’un deck ?

A gauche, le hall d’entrée de toutes les arènes du jeu, soit 99% des lieux visitables.

Partant d’un deck de base assez équilibré, on peut ensuite le modifier et en créer d’autres selon son bon vouloir. J’ai donc essayé de faire mon propre deck assez rapidement, et j’ai perdu comme une merde. Parce que j’ai réitéré l’erreur que je faisais étant gamin : charger mon deck avec des Pokémon mais sans carte Énergie. Et sans elles, les Pokémon sont aussi utiles qu’un toit ouvrant sur un vélo : incapables d’attaquer, il ne leur reste qu’à attendre une défaite certaine.

Mince alors, ce jeu n’est pas sympa ! Je débute, je passe le tutoriel et je perds mon premier combat, alors que j’ai à peine modifié le deck qu’on vient de me donner ! Heureusement, la défaite ne se traduit par aucune pénalité, et on peut relancer le combat si on le souhaite. Alors quoi, je remets mon deck en état, et je vais bien réussir à gagner, non ? Ben, ça dépend.

C’est parti pour le duel !

Alea jacta est

Ça dépend, en effet, et de plein de choses. Le premier problème, à savoir la grande régularité nécessaire pour construire son deck, n’en est pas vraiment un lorsqu’on a compris comment faire, et il fait partie de l’apprentissage normal du jeu. Sur 60 cartes, il convient de mettre un bon tiers, voire une moitié, de cartes Énergie, en sélectionnant plutôt un ou deux types, et donc en mettant des Pokémon des mêmes types capables d’utiliser ses cartes. La logique veut aussi qu’on ait deux ou trois exemplaires des Pokémon de base, pour être sûr de pouvoir attaquer, et non pas de mettre mille évolutions qui ne pourront jamais être jouées.

Voilà pour la théorie, qui permet de construire un deck équilibré après quelques essais infructueux. C’est un jeu de stratégie, après tout, donc ce n’est pas gênant, bien au contraire. En revanche, le hasard et l’aléatoire ont une place bien trop importante pour moi.

C’est bien simple : parfois, vous allez attendre plusieurs tours avant que votre Pokémon puisse attaquer, simplement parce que vous n’avez pas les cartes Énergie convenables. Votre main peut aussi contenir plein de Pokémon de base, faibles, sans que vous ne puissiez jamais voir arriver leurs évolutions. Ou bien, vous allez piocher directement les évolutions puissantes, mais le Pokémon de base restera aussi insaisissable que la qualité dans Dakar 2. Ainsi, j’ai plié certains combats en deux minutes car toutes les conditions étaient réunies (cartes Énergie, évolutions puissantes, malchance de l’adversaire), et certains ont été d’une ridicule facilité pour l’ennemi, impossible que j’étais de porter la moindre attaque et de faire quoi que ce soit.

Il semblerait que je ne sois pas à mon avantage dans le premier duel…

A tout ceci, vous me répondrez : débile, modifie ton deck. C’est bien ce que j’ai fait ! Mais cet aléatoire se manifeste même avec les decks équilibrés pré-construits dans le jeu ! On ne sait jamais ce qui va se passer : l’adversaire va-t-il avoir de la chance ou pas ? On ne sait pas. Certains vous défoncent en quelques tours, jusqu’à ce que vous jouiez une partie très avantageuse, et à vous la victoire.

Du coup, vous allez encore me dire : c’est le propre de tout jeu de carte, l’aléatoire. C’est vrai. Mais dans ces conditions, le jeu souffre inévitablement de la comparaison avec le vrai jeu Pokémon, où l’aléatoire n’avait que peu de place : si vous aviez des Pokémon forts avec des attaques appropriées, et si vous aviez la jugeote de les protéger des types ayant l’avantage, les matchs faisaient la part belle à la stratégie, et peu à l’aléatoire. J’ai un Tortank dans mon équipe, je le sors et j’éteins tous les Dracaufeu du monde. Si je perds contre un champion d’arène, je retourne glaner quelques niveaux, acheter des potions, choper un autre Pokémon pour modifier mon équipe.

Ici, vous avez un Tortank quelque part, mais il sort quand ça l’arrange, et vous, vous espérez. Ici, quand vous perdez face à un champion, vous pouvez peut-être gagner en relançant directement le match. Ou pas forcément. Vous aurez beau avoir un Pokémon puissant ou évolué, avec une main équilibrée, il restera comme un manche incapable d’attaquer car vous aller peut-être passer 5 tours sans piocher assez de cartes Énergie. Ou bien, vous aurez beau avoir des cartes Énergie plein la main, vous n’aurez pas les Pokémon capables de les utiliser. Pire que tout : avoir un Pokémon, ses évolutions dans la main, des cartes Énergie, mais mourir juste au moment où vous aviez enfin réussi à lui attacher ses 2 ou 3 cartes Énergie nécessaires pour porter sa putain d’attaque. La frustration maximale, en somme.


Allez, achète du Pokémon, gamin

Du fait de la frustration engendrée et de l’aléatoire, le jeu a tout de même un goût de « reviens-y » : on rejoue en attendant une situation favorable, où on battra enfin l’adversaire. On se dit : bon sang, mais ça va passer, à force, j’ai un super deck ! Et ça finit par arriver, parfois. Mais quand bien même, ai-je gagné parce que mon deck était bien construit ? Ou bien parce que j’ai eu plus de chance que l’ordinateur ? Le sentiment de récompense propre à la série est ici totalement différent : je ne me suis jamais senti puissant, je me suis senti cocu.

Au prix de cette victoire, on gagne plusieurs boosters de cartes, comme si on sortait de chez le marchand. Et là, on se rend compte que mince, cette carte existe ?! Super, je la veux en vrai ! Un Roucarnage holographique, trop cool ! Il faut que je me le procure ! Allez maman, tu veux pas aller acheter le journal ? Je viens avec toi !

Ce jeu tient du génie, pour ce point-là. Non content de trainer du côté consanguin de l’histoire du jeu vidéo (avec le jeu Street Fighter The Movie, tiré du film, lui-même tiré du jeu vidéo, et beaucoup d’autres), le jeu fait aussi partie de la branche des essoreuses de licence, les produits dérivés qu’on n’aurait jamais cru voir arriver mais qui sont là, venus des confins de la galaxie pour vendre encore plus. Véritable vitrine pour les cartes, il permet d’y jouer sans se ruiner (ou ruiner ses parents) en achat de boosters pour former un deck convenable, tout en n’oubliant pas d’où il vient et en le rappelant souvent. Le visuel des cartes est quasiment le même que celui des vraies cartes, jusqu’aux petits logos indiquant de quelles extensions ce Smogogo ou ce Machopeur proviennent. Il est alors tentant de continuer sa collection en vrai, après avoir eu connaissance de toutes les cartes potentielles qu’on pourrait rafler…

Issue d’un match classique : la défaite. Tiens, puis je vous laisse chercher l’option Sauvegarder dans le menu. Elle existe mais elle est cachée.

A sa décharge, le jeu a quand même un intérêt plus prononcé que certains autres opus de la licence dont on cherche encore la raison d’être (Pokémon Channel, ça c’est pour ta gueule). Il offre une autre vision de Pokémon, une autre façon d’appréhender la stratégie, qu’elle plaise ou non, et qui, j’en conviens, n’est pas inintéressante sous certains aspects. Malgré tout, rien à faire, j’aligne défaite sur défaite en espérant avoir un jeu favorable, et ce genre de mécanisme de jeu ne me motive absolument pas. Je préfère jouer avec les sprites des bestioles qu’avec les sprites des cartes représentant les bestioles.

Oh, mais sinon, c’est le premier jeu de la licence où on peut courir en maintenant B appuyé, et ça, c’est quand même cool.

En bref…

Un petit bilan ? Je lance une pièce : si c’est pile, je le fais. Si c’est face, il n’y en aura pas.

Face. C’est bête. Relis ce test depuis le début pour réessayer !

Conclusion

Avec le recul, ce jeu possède une certaine aura auprès des fans l’ayant pratiqué pendant leur jeunesse. Le découvrir sur le tard ne lui rend pas forcément grâce, c’est vrai, mais tout de même. Un intérêt plus que limité, un contrôle minimal sur le déroulement des matchs, 5 ou 6 musiques qui se battent en duel, 20 PNJ, aucune aventure… Avec un habillage plus conséquent, on aurait fini par oublier l’aléatoire qui plombe le plaisir de jeu. Ça n’aurait pas été difficile de rendre le jeu moins frustrant. Mais là, quand je perds, qu’ai-je d’autre à faire que recommencer ? Aucune zone à explorer, l’amélioration des decks est limitée par l’acquisition de cartes que je remporte en gagnant des duels, donc je suis coincé jusqu’à ce que je gagne. Hé bien allez, si je fais face, je vais trier mes caleçons. Si c’est pile, je vais trier mes chaussettes.

Pile. Bon voyage dans ta boîte, Pokémon Trading Card Game.

Voir aussi :

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