Voilà voilà… Annoncé, repoussé, peaufiné, transféré… Le développement de The Legend of Zelda: Breath of the Wild semble avoir été un parcours semé d’embuches. Et en même temps, quand on voit la taille de la bête, on se doute que le voyage aura été des plus perturbés. Toujours est-il que maintenant qu’il a atterri dans nos Wii U et dans nos Switch, il va être temps pour nous de livrer un avis bien tranché sur cette nouvelle recette. Attention bande de sauvages, le souffle NDMien va s’abattre à nouveau sur Zelda.
On repart à zéro
Breath of the Wild ouvre une troisième époque dans l’histoire de la saga. La première, c’était l’époque des jeux en 2D qui s’est conclue magistralement avec l’excellentissime A link to the Past. La deuxième, c’est l’époque d’Ocarina of Time et de tous ceux qui ont essayé de faire aussi bien que lui sans jamais y arriver. Le dernier épisode en date, Skyward Sword, a tenté d’amorcer une désolidarisation de la trame classique des Zelda 3D (donjon, objet, boss, cœur) avec le résultat que l’on connaît. Un peu avant, c’était A link Between Worlds qui avait tenté de rompre avec l’ordre défini des donjons qui n’était plus autant impératif qu’avant. Bref, la fin du règne du monarque absolu de droit divin Ocarina of Time et de son fils spirituel Twilight Princess est annoncée, car avec ce Breath of the Wild, les développeurs ont fait fort.
On ne va pas tourner autour du pot plus longtemps, il ne reste de Zelda que la princesse à sauver, le héros Link (on a le nom mais pas la tunique verte) et le méchant Ganon. Quelques éléments scénaristiques comme l’épée de légende sont toujours là, tout comme la musique du château d’Hyrule. Mais le reste… Finis les boomerangs en tant qu’objet secondaire permettant de résoudre les énigmes. Finis les grappins pour accéder aux hauteurs, finies les lanternes et les énigmes des quatre candélabres associées, finis les flacons à récupérer… Je continue ?
Finie aussi la trame devenue classique pour ne pas dire que c’est la définition même d’un jeu Zelda. Il n’y a plus d’obligation de parcourir un donjon pour récupérer un nouvel objet permettant de progresser. D’ailleurs, les premiers speedruns n’ont pas tardé à se montrer sur la plateforme vidéo américaine d’Alphabet. 1h30 dont près de 30 minutes pour le combat final. Voilà. Le plus long aura été de récupérer le premier objet en suivant une progression scénarisée, la seule qui soit obligatoire dans toute l’aventure. C’était une promesse, et elle a été tenue.
Vous l’aurez compris, après s’être arraché les cheveux à nous faire des préquelles et reboots scénaristiques, cette fois-ci, les créateurs nous servent un reboot total de la saga. Il ne reste plus grand-chose de toutes les évolutions majeures de la saga de ces vingt-cinq dernières années. Vous voilà prévenus. Est-ce un mal ou un bien ? Un mal pour un bien ? On va pouvoir en reparler plus en détails dans cette analyse, mais plongeons-nous d’abord dans ce qui nous happe dès les premières secondes de jeu… Parce que c’est du grandiose de chez grandiose !
Des paysages à couper le souffle
Link se réveille perdu, comme le joueur, dans un sanctuaire bizarre, une voix bizarre dans la tête, une tablette bizarre en guise d’équipement… Et puis on sort de là. Link court, le thème principal du jeu fait son apparition, et on débarque au bord d’une falaise. Au bord d’un promontoire qui donne une belle vue sur le monde qui nous attend : volcan au loin, montagnes un peu partout, un étrange objet volant non-identifié à l’Ouest… Et le château plein centre. Le logo du jeu s’affiche, l’aventure Breath of the Wild peut commencer.
Ces cinq premières minutes posent le ton et donnent une idée de ce que peut réserver le jeu.
Passons les politesses usuelles rapidement : oui, parfois le « framerate » en prend un coup assez sérieux, dans certains environnements un peu trop feuillus, ça en devient même très flagrant. Aussi, voir apparaître les montagnes au loin au fur et à mesure que l’on avance vers elles peut poser un souci à certains, comme si le jeu chargeait sous nos yeux. Voilà. Techniquement, le jeu se paye des pépins qu’on aurait préféré ne pas avoir, mais c’est comme ça. Les limitations du développement en duo, à la fois sur Wii U et sur Switch, en sont sûrement la cause, autant que les capacités technologiques des deux consoles.
Et alors ? Breath of the Wild n’est pas aussi clinquant qu’un Uncharted 4. Et alors ? Dès l’introduction du jeu, on est happé dans cette version d’Hyrule en monde ouvert. Les décors vus au loin lors de cette scène promettent beaucoup : les montagnes et les forêts que l’on aperçoit en sortant du sanctuaire de la résurrection ont l’air accessibles. Et elles le sont, il suffit juste de se mettre en route et de s’y diriger. À moins d’être entravé par une jauge d’endurance un peu mince, tous les recoins d’Hyrule sont à portée de main. Ou de paravoile. Ou à foulée de cheval. Et bordel, il y en a des choses à voir.
Les jeux de la saga nous avaient habitués à des environnements variés, pas forcément très détaillés, mais suffisamment intéressants pour qu’on s’y plonge sans y penser. Breath of the Wild le fait, bien sûr, mais multiplie tout ça par je-sais-pas-combien. Je n’ai pas envie d’être marseillais à exagérer le chiffre. L’Hyrule de ce jeu est divisé en plusieurs zones que l’on peut explorer (ou pas) à sa guise. On peut aller où l’on veut, quand on veut. Une liberté incroyable qui va de paire avec le côté « Robinson Crusoé » que le jeu revêt lorsqu’il nous balance dans la nature presque sans aucun repère.
On passe de plaines bordées de rivières à de grands bois touffus, de montagnes enneigées à un vaste désert, d’une forêt tropicale luxuriante aux flancs d’un volcan aride. Avec une seule constante : c’est beau et ça donne envie d’en voir plus. Le monde fourmille de différents petits détails qui donnent vie à un Hyrule pourtant marqué par la dévastation d’il y a 100 ans. Où qu’on aille, c’est la découverte qui prime et l’émerveillement perpétuel de voir des décors qui donnent toujours envie d’aller plus loin.
Je pourrais citer beaucoup d’endroits pour illustrer tout ça mais ça serait aussi gâcher la surprise pour ceux qui n’y sont pas encore. Il y a des concepts particulièrement incroyables qu’il faut découvrir sans rien en savoir, notamment une certaine île au Sud-Est. De toute façon, à chaque fois que je pensais avoir trouvé une nouvelle zone favorite, la suivante arrivait toujours comme une objection pour me faire réaliser qu’au final il y a toujours au moins un ou deux lieu(x) incroyables et fascinants à voir dans chacune des régions d’Hyrule. Il y a une telle variété que tout le monde y trouvera son compte, à défaut de ne pas aimer comme moi tous les environnements.
Le seul bémol que j’aurais à remonter est une critique que j’ai tendance à faire à tous les jeux vidéo qui optent pour des rendus réalistes, mais qui ici est cristallisé sur deux cas de figure bien précis. Lorsqu’il pleut, les environnements, notamment falaises et rochers, deviennent forcément mouillés. Et les reflets de lumière dessus donnent l’impression d’avoir des décors plastiques, qui jurent beaucoup avec le reste qui semble, malgré les quelques textures approximatives, réaliste.
Idem pour l’herbe au soleil : lorsque celui-ci brille, l’herbe a parfois tendance à s’illuminer beaucoup trop. Ça a tendance à me sortir immédiatement de l’expérience et à me faire dire « Ah c’est dommage qu’il y ait ça ! ». Les seules occasions où j’ai pu me faire cette réflexion avec les baisses de framerate.
Une histoire à la demande
La nouvelle aventure de Link se déroule 100 ans après de funestes événements qui ont conduit à la destruction du Royaume d’Hyrule. Il n’en reste désormais plus que des ruines. Fort heureusement, les habitants survivants ont réussi à rebâtir leurs villages et la vie a repris son cours. Mais la menace gronde. Dans les ruines du château, confiné par une puissante magie, Ganon, le terrible fléau qui s’est abattu sur la province attend son heure pour faire son grand retour.
Il y a 100 ans, la princesse Zelda, aidée par cinq prodiges, a échoué à protéger le royaume d’Hyrule. Elle a cependant réussi à emprisonner Ganon, mais la face du monde était déjà changée. Les dégâts étaient pour la plupart irréparables. L’influence du fléau, toujours présente en de nombreuses régions, a contraint les habitants à s’exiler. Le Royaume sans souverain a disparu et la population s’est regroupée en clans. Hyliens, Sheikahs, Zoras, Gorons, Piafs, Gerudos, Korogus… tous ont regagné leurs terres originelles, le plus loin possible de l’ancienne citadelle et du château où sévissent encore les terribles gardiens, des armes robotiques conçues pour repousser le mal et qui se sont finalement retournées contre leurs créateurs. Seuls subsistent en ces lieux les êtres ayant répondu à l’appel de Ganon : Moblins, Bokoblins, Lézalfos et autres Octorocks.
C’est dans ce monde que s’éveille Link, un beau jour, dans un sarcophage étrange situé dans un temple appelé « sanctuaire de la résurrection. » Mais Link a perdu la mémoire. Il ne lui faut pas bien longtemps pour mettre la main sur une tablette Sheikah, étrange instrument aux fonctions multiples qui vont l’accompagner dans ses premiers pas. Sur le plateau du prélude, là où commence l’aventure, le temps semble comme figé. Des ruines à perte de vue, recouvertes par une verdure éclatante. Seul habitant des environs, un vieil homme qui peut apprendre à Link les rudiments de la survie : récupérer des armes, attaquer ses ennemis, éviter les combats perdus d’avance et bien sûr se cuisiner de bon petits plats pour recouvrer toutes ses forces en cas de besoin.
Le vieil homme possède également une paravoile, un objet permettant de parcourir de grandes distances en planant doucement, ce qui permet de rejoindre toutes les zones autour du plateau du prélude sans se briser les os en tombant de haut. Mais, tout savant qu’il paraît, le vieil homme exige que Link parte avant tout s’équiper dans les sanctuaires initiatiques dispersés aux alentours. Là-bas, Link pourra apprendre à se servir de la tablette Sheikah. Et ce n’est qu’une fois cette première mission accomplie que Link va découvrir dans quel monde il s’est réveillé, ce qu’il a accompli avant de s’endormir et ce qu’il doit accomplir maintenant. Et ce n’est pas une mince affaire…
Voilà pour la mise en bouche, je m’en voudrais d’en raconter davantage car la découverte de cette histoire est tellement bien pensée que c’est un réel plaisir de se laisser conter les événements après avoir fait l’effort de remplir les épreuves du jeu si cela vous chante. En effet, depuis Ocarina of Time, la saga nous a habitués à suivre les aventures dans un ordre très chronologique, empêchant parfois d’accéder à une zone du jeu tant que tel élément scénaristique n’était pas résolu. En soi, ce procédé avait du bon puisque les histoires étaient passionnantes… Du moins au départ. Oh si, l’histoire d’Ocarina of Time, remplie de personnages attachants, est fabuleuse. Celle de The Wind Waker, qui sort enfin des sentiers battus, a été une véritable claque. Celle de Twilight Princess, avec ses surprises et ses rebondissements, a démontré la profondeur de l’univers et le talent des artistes qui l’ont créé… Mais Twilight Princess a aussi marqué le départ d’une très mauvaise habitude qui n’a fait qu’empirer au fil des épisodes. Un scénario trop présent, des personnages trop bavards, une progression linéaire… On pardonne à Twilight Princess puisque l’histoire est géniale. Mais que dire de Spirit Tracks ou Skyward Sword ? Trois ou quatre éléments scénaristiques sympathiques et le reste plus inutile qu’une crotte de chèvre sur une aire d’autoroute. Ça a été douloureux. Très douloureux.
Je suis volontairement long sur cette question, mais il est important de se rappeler d’où on vient et donc comment apprécier le bonheur absolu d’avoir non seulement une histoire qui tienne la route mais aussi la liberté la plus totale de s’en foutre royalement. Et c’est là que le jeu fait fort. L’histoire n’est pas un élément central dans l’aventure. Vous pouvez la zapper totalement, ça ne vous empêchera pas de continuer à jouer ni même de terrasser le boss de fin. Ceci dit, en tant qu’amateur d’histoires, je vous conseille vivement de recoller tous les morceaux du puzzle (puisque ça vous est présenté ainsi), car ça vaut le coup. Pas que les retournements de situation soient légion, juste qu’il est quand même sacrément intéressant de comprendre pourquoi on joue dans un univers post-apocalyptique… ce qui n’était arrivé qu’une seule fois dans la saga sans que cet aspect ne soit suffisamment développé pour avoir du sens (quand je vous disais que l’histoire de Skyward Sword était pourrie ^^). C’est d’autant plus intéressant que ces morceaux de puzzle rendent le personnage de Zelda beaucoup plus passionnant et substantiel qu’il ne l’a été avant.
Au niveau de la traduction française, pour ce que j’en sais, les traducteurs me semblent avoir fait un peu plus d’efforts que dans les jeux précédents. Les noms de lieux ou de personnages rendent presque tous hommage à des lieux, personnages et même objets issus des anciens épisodes de la saga. Et hormis les hommages qui concernent les deux premiers épisodes (les seuls n’ayant pas eu droit à une traduction française), on constate ici une certaine fidélité aux travaux effectués ces dernières années… Même si ça balaye toujours un peu plus celui de l’époque Nintendo 64 où Julien Bardakoff prenait la liberté de donner pas mal de couleurs à sa traduction. Bref, une traduction de qualité quoi que finalement trop consensuelle à mon goût. On regrettera cependant la présence de quelques fautes d’orthographe et de grammaire. Elles nous prouvent encore une fois que la régionalisation des jeux vidéo demeure un aspect qui tarde à se professionnaliser et à être reconnu autant que dans le milieu de l’édition littéraire, par exemple.
Une trame sonore… surprenante…
Entre clins d’œil et déceptions, les thèmes marquants sont inexistants. Le seul thème magistral du jeu, tout à la fin, se paie même le luxe de subir une horrible coupure de tempo, faisant un peu penser à une chanson de Vianney. On a l’impression que ça va démarrer et en fait non.
Un Zelda sans grand thème pour la plaine d’Hyrule, pour le désert Gerudo ou pour d’autres environnements tout aussi variés, ça semble être une hérésie ? C’est pourtant ce blasphème qui nous attend dans Breath of the Wild. Le minimalisme musical est de mise pour cet épisode qui, comme les différentes vidéos de making-of l’ont prouvé, a surtout voulu mettre en avant l’immersion plutôt que l’ambiance et l’épique. Est-ce que ça veut dire que le côté épopée a également disparu de la bande-son du jeu ? Pas tout à fait. Et forcément, il y a de quoi être déçu.
Du moins au départ. L’habitude prend ensuite rapidement le pas, même si l’amertume de la déception peut rester dans la bouche tout le long du jeu. Donc, à la place des grands thèmes phares de la saga, à la place de nouvelles compositions aux envolées mélodieuses et grandioses, la compositrice Makana Kataoka nous livre des partitions dans lesquelles le piano se taille la part du lion. Encore de quoi faire de ce Zelda une entrée unique dans la saga.
Alors les thèmes ne sont donc pas les envolées symphoniques attendues mais plutôt des motifs de piano assez discrets qui se fondent dans le décor, pour mieux nous happer dans Hyrule. Il y a des thèmes différents selon que l’on est à cheval, à pied, de nuit, de jour, dans une plaine, au sommet d’une montagne ou au bord de la mer. Mais tous ont cette caractéristiques d’accompagner le voyage plutôt que de le porter, à la différence des autres épisodes de la saga.
Et petit à petit, les véritables thèmes se révèlent. Au début, la déception prend encore une fois le dessus, car les quelques thèmes de villages ne sont pas si mémorables qu’on l’aurait souhaité, en dehors du domaine des Zoras et du village Piaf, qui empruntent leurs mélodies principales à quelques autres lieux connus de la saga.
Les donjons restent eux aussi dans l’ambiance : l’emprise de Ganon se retrouve aussi bien à l’écran que hors des hauts-parleurs. La musique évolue alors en fonction de notre avancée à l’intérieur. Mais là encore, tout n’est pas si mémorable ; même si les phases pré-donjon ont de très belles compositions, notamment celle jouée juste avant de pénétrer dans le donjon Zora.
Mais comme dans tout le reste du jeu, les surprises émaillent la bande-son et montrent à quel point ce Zelda a fait l’objet d’un souci du détail hallucinant. Premier exemple, la musique de chevauchée de nuit qui, si l’on reste à cheval suffisamment longtemps, nous laisse entendre une version mélancolique du thème principal de la saga au violon. Magnifique. Second exemple, la musique de chevauchée, de jour cette fois-ci. Ce n’est pas évident à remarquer mais ça l’est beaucoup plus une fois la musique accélérée : les cordes qui accompagnent en fond la mélodie au piano jouent une version de la berceuse de Zelda.
Tout ça, et bien plus encore, prend une autre dimension une fois arrivé au château d’Hyrule, qui est l’une de mes compositions préférées de toute la saga. Difficile d’en parler sans spoiler donc je préfère vous laisser la surprise, mais c’est véritablement un chef-d’œuvre. À mes oreilles en tout cas.
Alors malgré la présence de thèmes plus mémorables et épiques, ce qui frappe énormément en jouant à Breath of the Wild c’est que toute la minutie qui a été apportée lors de la conception du jeu se retrouve également dans les bruitages. L’ambiance sonore est exceptionnelle et je me demande souvent si les sons d’animaux que l’on entend dans les forêts, les plaines, etc., sont oui ou non aussi variés qu’ils ont l’air. J’ai cru comprendre que certains sur Internet avaient cru reconnaître des gazouillis d’oiseaux différents.
L’approche s’est donc élargie à tout ce qui était du domaine sonore : les pas de Link ont été enregistrés pour les différentes conditions que les joueurs rencontrent dans le jeu : marcher dans l’herbe, marcher dans de l’eau, nager, marcher dans le sable ou la neige, etc. Le son du vent ou de la foudre donneraient presque l’impression d’être dans Hyrule en personne.
Reste alors à traiter la question du doublage. Une première dans la saga et presque une première chez Nintendo qui, hormis dans les sagas Layton et Star Fox, n’avait jamais vraiment pris le temps de doubler ses jeux en plusieurs langues. Pas moins de huit ont été enregistrées. Japonais évidemment, anglais bien sûr, français parce que c’est classe, mais aussi castillan, espagnol Sud-américain, italien, allemand et russe. Bah ouais. Au moins on ne peut pas dire que les choses ont été faites à moitié.
Bon, rassurons tout d’abord les plus sceptiques : Link est toujours muet. Et hormis le fait qu’ils lui ont collé une voix plus androgyne que jamais, on ne regrettera pas de ne toujours pas entendre sa voix (et même de ne pas lui voir trop de lignes de textes) afin de continuer à s’identifier à lui comme toujours.
Que dire des autres voix ? Déjà qu’elles n’apparaissent pas tout le temps et qu’elles ne concernent, finalement, qu’une poignée de personnages clé. Le doublage, de qualité pour ce qui est de la version française, n’est là que pour renforcer l’émotion de scènes cinématiques précises. Cela a l’avantage de permettre aux metteurs en scène de maîtriser le tempo, chose qui est difficile quand il faut lire un texte et appuyer sur un bouton pour passer à la suite. À certains moments, j’ai trouvé cette approche intéressante, à d’autres franchement inutile, à la limite de me couper dans mon élan. À aucun moment en tout cas ça ne m’a semblé méga pertinent, mais après tout pourquoi pas ?
Seul truc dommage : on ne peut pas choisir la langue et les sous-titres, à part en changeant complètement la langue de la Switch, ce qui prive également de sous-titres en français. J’ai toujours du mal à comprendre pourquoi on impose une langue audio ou textuelle dans un média, que ce soit dans les films ou dans les jeux. J’aimais bien, d’ailleurs, il y a encore quelques années, avoir la possibilité de faire un jeu dans une langue puis de le refaire dans une autre pour comparer. Il y a parfois des nuances qui sont intéressantes à saisir. Et puis si le travail a été fait dans plusieurs langues, ça coûte quoi de permettre au joueur de choisir ce qu’il a envie d’entendre ou de lire ? On n’est pas tous monolingues sur Terre. Et on apprend certainement mieux à parler une langue en écoutant des dialogues dans des médias audiovisuels qu’en écoutant des profs dont ce n’est pas la langue maternelle. M’enfin je m’égare ^^
Retenez donc que le jeu propose pas mal de lignes de texte en version audio et que la qualité est au rendez-vous. À titre personnel, il n’y a qu’une seule voix qui m’ait un peu horripilé, mais vu le personnage, je suis sûr que c’est un parti pris. Discutable, mais compréhensible quand même.
Tous les boutons de la manette mis à contribution
Le gameplay de ce Zelda, c’est un peu l’enfer au départ. Pour les habitués, un Zelda c’est quoi ? Un bouton pour attaquer, un pour le bouclier et un, deux ou trois pour l’objet spécial que l’on doit utiliser selon les circonstances. N’oublions pas la visée, tant qu’à faire. Voilà. C’est simple. Tout est assigné parfaitement et il n’y a à priori pas de souci pour s’y retrouver.
Comme pour de nombreuses choses, Breath of the Wild change la donne. Alors je vous arrête tout de suite : oui, ça reste simple. Sur le papier en tout cas. Tous les boutons servent à quelque chose et à une seule et unique fonction pour la quasi-majorité d’entre eux. Le bouton d’attaque est là, pas de problème. Pareil pour la sortie de bouclier ou pour l’arc. Pareil pour le saut. Mais en fonction des circonstances, une commande peut quand même avoir une toute autre utilité : on peut détaler comme un lapin en épuisant sa jauge d’endurance avec B, mais on peut également lâcher prise en plein assaut d’une falaise avec le même bouton.
A priori on reste en territoire connu. Mais tout n’est pas aussi simple. Avec la complexification (toute relative) du gameplay, arrive forcément la complexification des boutons. Comme je le disais, ils sont tous utilisés. Il n’y en a pas un qui ne sert à rien, et si c’est le cas au départ, cela peut changer au fil de l’aventure. Même les boutons situés dans les sticks multidirectionnels ont leur utilité… et pas une utilité secondaire, non. Vous en aurez besoin très souvent.
L’un des gros ajouts notables est celui de l’inventaire. C’est la seule entorse à la règle « un bouton, une action » puisqu’il va s’agir ici d’utiliser la croix directionnelle dans trois directions (gauche, haut ou droite) afin d’accéder à un inventaire distinct. Il devient ainsi possible de sélectionner des armes à la volée pour s’adapter à une situation donnée (un marteau pour taper dur et fort contre un ennemi lent, ou au contraire une épée tenue à une main pour frapper des coups rapides et tenir le bouclier en même temps). Pourtant, même avec plusieurs dizaines d’heures de jeu au compteur, c’est parfois loin d’être pratique. Les pinceaux peuvent s’emmêler rapidement : il m’arrive ainsi très fréquemment de vouloir changer d’arme de combat rapproché mais d’appuyer sur le bouton qui permet de changer de bouclier ou même sur celui qui permet de changer le pouvoir de la tablette Sheikah. Et c’est sans compter la manipulation un poil trop complexe pour changer de type de flèches.
D’autres cafouillages sont également possibles mais heureusement la prise en main reste tout de même immédiate. Deux points viennent cependant noircir le tableau. Le premier, c’est la caméra. Elle est franchement trop proche de Link et il est impossible de l’en éloigner. Alors, c’est pratique d’avoir une caméra qui va dans tous les sens, mais quand elle se rapproche sitôt qu’un morceau de mur ou de tronc d’arbre s’approche, on perd en lisibilité et c’est rageant. On ne retrouve pas la même sensation de liberté que dans The Wind Waker, notamment, où l’on pouvait passer d’un mode auto à un mode manuel pour contrôler la caméra. Ici les deux modes semblent s’emmêler et ce n’est pas une réussite. Autre point noir, le gyroscope que l’on peut avoir un peu de mal à utiliser, en particulier lors des énigmes de sanctuaires qui ont recours à cette fonction des consoles. Dans ces moments, le jeu, qui ne pardonne JAMAIS de toute façon, est encore plus impitoyable. Rien qu’un léger mouvement du poignet, fugace, peut complètement ruiner tous les efforts faits précédemment pour résoudre le puzzle. Rageant.
Quand je dis que le jeu ne pardonne jamais, ce n’est pas une exagération. Dès le départ, Link est lâché en pleine nature, avec le seul vieil homme comme allié pour lui expliquer de quoi il retourne, lui donner quelques conseils et même l’aider à se protéger du froid. À part ça, c’est le sentiment de liberté qui vient s’agripper à nous dès le départ. Mais qui dit liberté dit aussi tâtonnements et erreurs. Souvent fatales.
Il suffit également de voir à quel point l’amélioration des armures peut être cruciale pour éviter de se faire tuer en un coup par des ennemis pas vraiment surpuissants. Hyrule est une zone de guerre où les ennemis s’y mettent à plusieurs pour mettre Link au tapis, ou alors, ce sont des ennemis seuls qui sont capables d’enlever les trois quarts de la jauge de cœurs en un seul coup. Même protégé, c’est parfois limite.
J’ai tout de même envie de dire qu’on est plus souvent son pire ennemi dans Breath of the Wild que les ennemis eux-mêmes. Je ne compte plus les fois où je suis mort bêtement en décochant une flèche-bombe sur des ennemis un peu trop près. À flanc de montagne, c’est une erreur qui s’avère presque systématiquement fatale. Pareil pour les simples bombes, qui pourtant ne détonnent que lorsqu’on appuie sur la gâchette. Un simple oubli dans le changement de tenue peut également attirer la foudre sur ses équipements métalliques et nous griller sur place. Politique tolérance zéro. Le jeu ne laisse rien passer et, si ça peut mettre les nerfs à vif et donner envie de balancer la console de l’autre côté de la pièce, on s’y fait rapidement et on apprend à simplement penser à tout, devenir meilleur (dans les esquives, dans les stratégies pour venir à bout de groupes d’ennemis) et on s’amuse. Au pire, une mort vraiment « conne » laisse même hilare tellement ça peut sortir de nulle part et qu’on n’y avait pas pensé. Et contrairement aux épisodes précédents qui se jouaient à la Wiimote, ici en cas d’erreur, c’est la faute du joueur, pas de la technologie 😉
Le moteur physique de Breath of the Wild laisse à la fois très peu de choses au hasard et en même temps réserve énormément de surprises. Dans les sanctuaires, les énigmes peuvent avoir différentes solutions selon que l’on utilise tel ou tel pouvoir, ou que l’on tire parti d’une situation ou d’une autre. Il est désormais courant de se retrouver à discuter du jeu et de se rendre compte que même les boss ont pu être défaits avec une méthode totalement différente de la nôtre par d’autres personnes. Si une idée vous vient pour résoudre une énigme, mais que vous trouvez ça stupide, repensez-y : elle fonctionnera peut-être, même si ce n’est pas la méthode que les développeurs auraient privilégiée. Le jeu ne laisse pas seulement une incroyable liberté d’exploration, mais aussi une liberté d’actions presque invraisemblable. Et le mieux, c’est que ça ne ruine pas la difficulté.
Sur Wii U, mais à quoi bon ?
Quelle déception… Pour un jeu qui était initialement prévu sur Wii U, j’avoue que mes attentes étaient grandes. Car je fais partie des, apparemment rares, êtres humains qui trouvaient que le concept de la Wii U était le meilleur système de jeu vidéo possible : la synthèse de 30 ans du savoir-faire incroyable et unique de Nintendo (hormis le menu tout pourri). Et j’attendais grandement que Zelda puisse le prouver. Je m’attendais à bander mon arc au gyroscope, à écrire des annotations sur la carte depuis l’écran tactile, à gérer mon inventaire sans avoir à mettre le jeu en pause, à utiliser l’écran du Gamepad comme une lentille faisant à la fois office de longue vue et de monocle de vérité, à poser le Gamepad sur ma table de salon pour y jeter des coups d’œil de temps en temps alors que je joue avec le pad Pro, ou même avec la Wiimote tant qu’il n’y a pas de coups d’épée à donner dans le vide…
Rien de tout ça, Breath of the Wild est un jeu Switch, finalement. Et la Wii U n’aura eu droit qu’à la version inférieure. Et pour bien nous prouver à quel point la Switch est mieux que la Wii U, on a ici un jeu qui se permet d’avoir des baisses de framerate assez fréquentes et même parfois des freezes de plusieurs secondes. L’écran du Gamepad affiche un écran noir sur lequel il est écrit qu’on peut jouer sans télé… Sauf qu’on est sur Wii U, que l’écran est largement plus pourri que sur Switch et qu’on ne peut pas se déplacer sans embarquer un groupe électrogène. Le gyroscope est si mal configuré qu’on ne peut même pas viser aussi bien que dans le mini-jeu Zelda de Nintendo Land.
Je ne parlerai même pas de l’inutilité consternante de Miiverse dont la simple utilisation (ou la simple pression sur le bouton Home de la console) forcera le jeu à se relancer depuis le disque, ce qui peut prendre jusqu’à 30 secondes.
Resterait à parler de la possibilité de jouer avec la manette Pro Wii U, dépourvue de gyroscope, avec laquelle je n’ai pas tenu plus de dix minutes face à une horde de Bokoblins… Ils étaient un. Question d’habitude peut-être ?
Pour être honnête, le jeu n’est pas moins bien que sur Switch. Hormis la quasi obligation de jouer avec un Gamepad énorme (ce qui n’a pas été un problème pour ma part), le jeu est le même. Il a ses ralentis et les couleurs sont moins jolies. Mais c’est exactement le même jeu. Et c’est bien dommage, justement, parce que sur Wii U, on attendait des jeux innovants, différents, des expériences uniques. En se conformant à la Switch, ce Zelda qui devait sonner le glas d’une expérience vidéoludique contestée mais absolument géniale nous prouve une fois de plus qu’on a eu tort d’acheter et soutenir la Wii U toutes ces années. Ça fait pas trop plaisir.
On se consolera en se disant que, toute considération écartée, le jeu reste absolument génial et qu’il est possible d’y plonger sans être forcé d’acheter la petite dernière qui, il faut bien le dire, n’a pas encore le catalogue pour me faire rêver. On verra plus tard pour la suite 🙂
Mais en gros, on fait quoi dans ce jeu ?
Voilà voilà… Ça fait 15 heures que vous lisez, on a bien causé technique, on a vaguement expliqué qu’on allait devoir voyager, mais en gros, c’est comment qu’on s’amuse ? Oui, il a fallu attendre aussi longtemps pour qu’on en parle. Mais en même temps, vous êtes pas fins : vous confiez le test du plus gros jeu de Nintendo aux deux rédacs les plus bavards du dernier site web au monde à se concentrer exclusivement sur l’écrit. À un moment, il faut savoir dire non, les gens !
Bref, of the Wild n’est pas une course à l’armement comme ses prédécesseurs. Vous aurez la plupart de vos armes dès le début du jeu, et il faudra vous contenter de les améliorer ou d’en ramasser de plus puissantes au fil de l’aventure. À noter que les boomerangs, bien que présents, ne sont pas destinés à résoudre des énigmes comme ils pouvaient l’être avant. Leur utilisation a d’ailleurs été repensée, et je les ai trouvés, à titre personnel, totalement dispensables. Pas de grappin à l’horizon. Pas plus de gant de force, de fouet, de noix Mojo ni de missile à tête chercheuse. Quand on vous dit que les compteurs ont été remis à zéro, à un moment il va falloir nous croire.
Le jeu se déroulera alors en quêtes. La seule qui soit obligatoire, c’est la quête principale dont l’objectif est simple : battre Ganon. Toutes les autres sont facultatives (hormis la première heure de jeu, mais à ce moment-là, vous ne savez même pas que Ganon existe). Les autres quêtes sont là soit pour approfondir l’histoire, soit pour améliorer votre équipement. Et parfois les deux en même temps. Le déroulement des quêtes est probablement l’élément central qui permet encore de dire qu’on joue à Zelda. Les personnages non jouables, que vous prendrez souvent plaisir à aider tant ils peuvent être rigolos ou désagréables, auront des missions pour vous. Une énigme à résoudre pour trouver la destination, une petite épreuve plus ou moins difficile, un butin à rapporter et une récompense à la clé. C’est bien Zelda.
L’aventure est également parsemée de sanctuaires. Au départ, ces sanctuaires ressemblent à des didacticiels, mais au final, on se rend compte que ce que l’on apprend à y faire ne sert… que dans les sanctuaires. C’est un peu dommage d’ailleurs. Ceci dit, à la fin de chacun, vous récupérez une récompense qui fait office de quart de cœur puisque c’est en les collectionnant que vous parviendrez à augmenter le nombre de vos cœurs (qui sont passés à un maximum de 30 !!) et la durée de votre jauge d’endurance. A propos de celle-ci, d’ailleurs, vous ne tarderez pas à remarquer que l’augmenter n’est pas forcément une super idée. En effet, la jauge d’endurance, héritée de Skyward Sword, vous limite dans vos actions sportives (la course, la nage et la grimpette). Lorsque vous l’épuisez, il faut attendre qu’elle se recharge pour repartir à l’assaut. Mais plus la jauge est grande, plus elle met de temps à se recharger. Malin ! br>
D’autant plus que le jeu offre, avec les élixirs et la cuisine, la possibilité de réapprovisionner sa jauge d’endurance, tout, en partie ou même en extra, en en buvant, et ce même lorsqu’on est à flanc de montagne, sur les rotules, prêt à lâcher prise. Avoir le bon type de recette ou le bon type d’élixir peut donc sauver la vie très facilement.
Parlons-en rapidement de la cuisine, d’ailleurs. C’est un aspect inédit dans la saga, après tout ! Avec ça, Nintendo lâche encore un peu plus prise sur la recette séculaire d’un jeu Zelda pour se diriger vers ce que beaucoup de RPG japonais ou occidentaux font déjà depuis belle lurette : la collecte de matériaux et ingrédients et la cuisine. Là encore, Breath of the Wild se réserve le droit de nous larguer sans rien nous dire. On sait qu’il est possible de cuisiner parce qu’on a vu les bandes-annonces, mais concrètement, comment on fait ? Pour certains, ç’a été moins évident que prévu. Heureusement, une fois qu’on a trouvé, c’est vraiment la fiesta.
La plupart des ingrédients que l’on croise sur son chemin ont des propriétés qui permettent d’améliorer temporairement telle ou telle statistique : l’attaque, la défense, la discrétion, la vitesse et même… Augmenter temporairement le nombre de cœurs ! J’aurais aimé pouvoir dire que les combinaisons sont infinies mais à part quelques recettes inédites, on se limite finalement très vite à utiliser le même ingrédient au quintuple pour augmenter les effets, sans chercher à faire plus original. Tant que ça fonctionne, de toute façon… Le choix est d’autant plus restreint qu’on ne peut pas combiner des ingrédients avec différentes propriétés : si c’est le cas, le jeu fait un choix à votre place et décide quel est l’effet qui sera sélectionné dans le plat final. Un peu dommage au départ, de découvrir que l’on gâche tranquillou ses ingrédients en pensant bien faire pour un résultat nul. C’est pareil pour les élixirs, qui eux utilisent des ingrédients peu conventionnels comme des morceaux de monstres déchus ou des grenouilles et autres lézards. Les effets sont multiples et parfois très utiles pour survivre, notamment au froid ou aider Link à supporter la chaleur des déserts.
Et puis, il y a la petite musique pour accompagner la cuisson : elle est drôle et fait danser !
Les noix Korogus font également office de quête quasi principale puisque les récupérer vous permet d’augmenter la taille de vos sacoches : encore faut-il que vous ayez retrouvé cet imbécile de Noïa dont le « Yahaaaa » me fait hurler de rire à chaque pas de danse.
Et les donjons alors, allez-vous me dire ? Hé bien… Je ne sais pas si je dois vous le dire. Il y en a, mais il n’y en a pas. Si je vous les décris, vous allez avoir peur et allez brûler des poupées à mon effigie en maudissant mon nom (d’où l’avantage d’être anonyme en écrivant un test à deux : qui donc a écrit ces lignes et qui se cache derrière ce pseudonyme ?). Je ne peux pas nier que j’ai été extrêmement déçu par les donjons. Par le nombre ridicule et par… ce qu’ils sont. Mais d’un autre côté, il faut reconnaître que c’est un procédé ingénieux. Je n’ai pas passé moins de temps dans ces donjons que dans ceux de Twilight Princess, par exemple. Les mécaniques qui sont à l’œuvre sont assez originales. Et le plus intéressant dans tout ça, c’est sûrement ce qui se passe avant, pour accéder au donjon, et qui n’est pas sans rappeler Majora’s Mask. Mais Rhaaaa… L’aspect « entrer dans un donjon sans savoir ce que l’on va trouver à l’intérieur et n’en sortir qu’une fois le boss terrassé » n’est pas présent dans ce jeu et c’est mon plus grand regret… Presque le seul, mais il est de taille. br>
On pourrait pourtant faire remarquer que ce manque cruel de donjon ne se fait ressentir que lorsqu’on y pense. Parce qu’en plein jeu, l’exploration des régions d’Hyrule et la découverte des sanctuaires peut tellement prendre le pas sur tout le reste qu’on en oublie parfois que le côté donjon de ce Zelda est un peu décevant.
Et tout le reste, bah c’est de l’exploration, de l’exploration et de l’exploration. À vous de choisir comment vous allez explorer : en suivant le chemin, en regardant la carte ou bien en passant par des endroits que, si ça se trouve, les développeurs avaient pas prévu que vous viendriez vous y perdre. C’est juste génial, pour ne pas dire jouissif. Si certains ennemis (et je ne parle même pas des gros boss méchants vilains) vous paraîtront démesurément invincibles lors de votre premier passage, après avoir décuplé le nombre de vos cœurs, trouvé des armes de fou malade, amélioré vos armures pour devenir un gros balèze, vous rirez bien en voyant un monstre de quinze mètres de haut tomber en quelques coups seulement. Je me rappelle de certains, que j’avais croisés et qui m’embêtaient bien parce que je n’arrivais pas à les terrasser. Je me disais qu’un jour, je me préparerais comme un malade et j’irai leur mettre une bonne rouste, supposant qu’une fois morts, ils ne réapparaîtraient plus. Grand naïf que j’étais. À chaque lune de sang, tous les monstres reviennent y compris les gros balèzes qui bloquent le chemin. Si j’avais écrit le test à ce moment là, je l’aurais descendu sauvagement, le jetant plus bas de terre, le piétinant sauvagement et l’écrabouillant avec la jaquette de Spirit Tracks. Et le lendemain, j’étais devenu tellement fort (enfin Link est fort, moi je suis une quiche) que lesdits monstres ne faisaient pas le poids face à moi. Muahahahahaha !! Parfait.
Combien de temps face à la nature sauvage ?
Trop. C’est facile de se perdre dans l’immensité de l’Hyrule de ce Breath of the Wild. Les développeurs évoquent une taille similaire à la ville de Kyoto, au Japon, où est basé Nintendo ; et même avant ça, les estimations parlaient d’un monde de 360 km². Mais au fond la taille exacte, on s’en fout, ce qui compte, c’est qu’on y passe du temps. Alors certains peuvent terminer le jeu au bout de trente heures, filant directement vers les points principaux du scénario sans trop perdre de temps. D’autres se sont essayés au « speedrun » avec des chronomètres improbables…
Mais la disposition naturelle des zones d’Hyrule, ses différents paysages, ses différents lieux dignes d’intérêt nous entraînent toujours là où on ne devrait pas forcément être. Plutôt, ils nous entraînent hors du sentier que l’on s’était défini à l’avance. L’exemple typique était, après avoir activé une tour dans une zone jusque-là peu explorée, on repère facilement un ou deux sanctuaires à visiter. Alors on se met en route. Et puis on croise quoi ? Des morceaux de ruines ? Un monstre qui a l’air un peu trop costaud pour nous actuellement et qui force à faire un détour pour ne pas avoir à le combattre ? Un autre sanctuaire qui semble plus près, plus accessible et qui finalement est tout aussi éloigné que le premier que l’on avait repéré ? Au final, on perd du temps à ne rien faire, à juste aller d’un point A à un point B pour le plaisir d’inspecter un recoin étrange que l’on avait repéré avant. Sauf que même lorsqu’on pense avoir éculé toute une zone, il y a forcément des petits secrets qui restent.
Et des découvertes hasardeuses comme ça, il y en a des centaines. Peut-être plus. J’approche à peine des 100 heures de jeu et j’ai l’impression qu’il me reste encore mille et une choses à explorer aux quatre coins d’Hyrule. Notamment les sanctuaires. Ils sont 120 en tout et sont disséminés inégalement entre les zones (certaines n’en comprennent que 6, d’autres une belle dizaine) et certains sont BIEN cachés. Malgré le radar qui aide à s’orienter en direction de ces donjons miniatures, il faut parfois être à l’affût des moindres recoins de falaises pour en découvrir. C’est justement ce qui m’est arrivé tout récemment lorsque j’explorais la dernière zone que j’avais débloquée : le radar bipait comme jamais et, une heure et demie après, toujours aucune trace du sanctuaire. Jusqu’à ce que j’en découvre l’emplacement par hasard, arrivant par un angle que je n’avais pas encore fait (par contre réussir à en atteindre l’entrée était encore une autre partie de cache-cache…).
C’est bien sûr sans parler des quelques sanctuaires qui , pour les débloquer, nécessitent de résoudre des énigmes bien spécifiques et parfois retorses. Et c’est également sans mentionner la gargantuesque quête des noix korogus (900 en tout, bon courage).
Breath of the Wild est tellement truffé de choses à faire qu’on pourrait encore y être l’année prochaine à la même date. Les noix korogus n’en sont qu’un exemple : il y a aussi les missions que les PNJ peuvent nous proposer, à la manière d’un Xenoblade Chronicles. Ou encore l’amélioration des armures qui nécessitent des matériaux bien spécifiques à collecter à tel ou tel endroit ou en tuant le même monstre une bonne quizaine de fois (en admettant que l’objet récupéré soit le bon, sinon on peut déjà multiplier ce nombre par deux ou trois).
Au final, si bien sûr la quête principale est au cœur du jeu par son scénario, elle ne représente pas beaucoup en simples termes de temps de jeu. À moins de ne choisir de ne faire que ça, comme je l’ai déjà précisé plus haut. Car il y a un milliard de façons de jouer différentes. On peut aller au plus simple, au plus direct ; ou bien on peut décider de prendre son temps, d’explorer tout ce qu’il y à voir (certaines zones ne sont pas essentielles au déroulement du scénario par exemple) et de passer du temps à admirer les paysages, cuisiner, faire de la collecte de champignons ou de pierres précieuses… Parce qu’on en a besoin ou juste pour le fun.
En gros, Nintendo peut bien nous sortir son DLC d’ici quelques mois, il n’est pas certain que l’on ait fini d’explorer le jeu à cette date. Que ceux qui craignaient que le jeu soit, finalement, minimaliste pour justifier la sortie d’un DLC annoncé avant même la sortie du jeu de base se rassurent : il y a déjà bien à faire et vous en aurez pour votre argent.
En bref…
Pour une fois, voici un Zelda qui pourrait bien réussir à mettre tout le monde d’accord. Si en tant que vétéran de cette saga trentenaire, on peut regretter la disparition de certains éléments fondamentaux du genre, on ne peut que constater que l’âme est préservée. Ce qui rend cet épisode carrément facile d’accès pour tout joueur, initié ou non, qui va pouvoir trouver ses marques super rapidement et profiter comme un malade de cette expérience gigantesque. Le challenge est cependant ardu, quelque soit le mode de jeu retenu : soit foncer tête baisser et se friter à des monstres mille fois plus fort que soi, soit prendre tout son temps pour tout parcourir en long en large et en travers pour progresser, comme dans tout bon Zelda, et devenir le plus fort du monde pour battre le boss final dans un combat tout aussi dantesque. Tout le monde y trouvera son compte. Un véritable coup de maître.
On aime :
- Le sentiment de liberté
- L’immensité et la variété des environnements
- La cohérence de l’univers
- Le nombre hallucinant de trucs à faire
- Le personnage de Zelda
- L’ingéniosité des énigmes de sanctuaires
On n’aime pas :
- L’absence de musique (même si on comprend l’idée)
- L’absence de donjons Zeldaïques
- Les contrôles un poil trop complexes
- La version Wii U privée de toute fonction tactile
- Quand les armes cassent au plus mauvais moment
- La foudre
Verdict
Lost Spirit :
Évasion, découverte, exploration, etc. Choisir des mots pour décrire le ressenti et l’expérience laissés par Breath of the Wild n’est pas une mince affaire. Le jeu fourmille d’idées, de trouvailles et de détails qu’il faut absolument vivre ou découvrir par soi-même pour comprendre à quel point il est prenant. Et même quand on pense avoir fait le tour de telle ou telle région, on se rend facilement compte qu’on a loupé énormément de choses. C’est une ode à l’aventure et à l’exploration qui ne s’arrête pas même lorsque la fin du jeu est proche. Son scénario a beau ne pas être très abouti, sa mise en scène est d’une telle justesse qu’on a du mal à s’empêcher de tout vouloir connaître sur les événements d’il y a cent ans.
Je crois bien qu’Hyrule ne m’avait jamais autant donné envie de l’explorer, mais aussi de le sauver des griffes de Ganon.
Akin :
Depuis le temps que je rêvais de parcourir un Hyrule gigantesque, majestueux et surtout bien vivant, je dois dire que j’ai été séduit dès les premières minutes. Bon, je suis pas trop dans le délire post-apo, mais je ne peux pas nier que la première balade sur la plateau du prélude m’a filé une bonne bouffée d’oxygène… Et il ne s’agissait que de la zone la plus petite de la carte. Sérieusement, ils ont fait fort. Si les donjons manquent cruellement au fan de longue date que je suis, l’exploration, les quêtes secondaires, l’univers, l’humour… Tout le reste est bon à prendre. J’ai eu peur par moments, j’ai eu des doutes quand je voyais à quel point les développeurs avaient tranché dans le lard pour retirer les mécaniques héritées de A link to the past et Ocarina of Time. Je me suis demandé parfois si je jouais bien à Zelda. Mais la magie reprend rapidement le dessus. Ils ont réussi à trouver une nouvelle recette et elle est sacrément bonne. Félicitations aux développeurs ! Et vous, si vous n’avez pas encore mis les doigts sur ce joyau… N’attendez plus ! Vous pourriez rater le jeu de l’année, si ce n’est votre vie toute entière.