Après deux ans de furtives apparitions où la communication reposait plus sur le retard du titre que sur d’éventuelles infos à son sujet, l’E3 2016 a, comme prévu, levé une partie du voile de mystère qui entoure ce jeu. The Legend of Zelda : Breath of the Wild s’est montré plus qu’il n’a parlé. Nintendo privilégiant les longues sessions de démo gameplay, de let’s play, plutôt que de nous expliquer une à une toutes ses nouveautés. Car oui, ce Zelda tente une évolution dans la série, ou plutôt un retour aux sources, celle de l’immense liberté qu’offrait le tout premier épisode sur NES. Ayant pu m’essayer aux deux démos du jeu, voici le debrief de mes impressions, quelque part entre scepticisme et excitation.
Ceci est un aperçu basé sur des impressions manette en main. Pour avoir un exposé complet des nouveautés, c’est par ici.
Man vs Wild
L’essai sur Zelda se faisait sur deux démo. La première, scénarisée, commençait dans l’espèce de grotte où Link se réveille grâce à la voix d’une femme. Une fois sorti de notre tombeau, le joueur admire la vue qui s’offre à lui et prend pleinement conscience de l’immensité du monde à parcourir, quand bien même cette démo représente, selon Nintendo, 2% du jeu total. Notre but était de nous rendre à un point particulier de la carte afin de faire sortir de terre une tour, où la mystérieuse voix entre à nouveau en contact avec nous afin de nous montrer le mal qui gangrène ce monde.
La seconde démo, bien plus libre, nous largue au milieu de la forêt avec quelques armes et objets (bombes, magnétiseur) afin de nous montrer le potentiel de la chose.
Partons d’abord sur l’aspect le plus plaisant du titre à mes yeux, à savoir le côté aventure bien plus poussé qu’auparavant. Le jeu est immense et regorge de points d’intérêts qui nous feront dévier sans arrêt de notre itinéraire, comme ce fut le cas dans la démo scénarisée que je n’ai pas pu finir à cause d’une grotte à bokoblins récalcitrante. Ces derniers sont d’ailleurs bien plus agressifs et menaçants qu’ils ne l’étaient dans les autres épisodes de la série. C’est également l’un des points qui m’a le plus convaincu dans cette session de jeu. Link n’est plus le cul-terreux qui devient invincible dès que le joueur l’incarne, pouvant occire des dizaines d’ennemis sans sourciller. Vous êtes ici très vulnérable dès le début du fait de votre équipement bas de gamme et votre jauge d’endurance qui fond à la vitesse d’un sorbet dans un four. Le moindre ennemi vous retirant la moitié de votre vie (un coeur et demi sur trois donc), foncer dans le tas est donc la dernière des solutions à envisager. L’approche silencieuse ou mesquine est à privilégier et pour cela, une jauge à l’écran illustre le bruit que vous produisez. Vous pouvez ainsi réduire au silence celui qui, perché sur sa tour de guet, préviendra ses potes s’il vous repère. Si c’est malheureusement le cas, il vous reste votre astuce, consistant à vous placer en hauteur pour jouer de l’arc soit pour transformer vos assaillants en cactus, soit pour, par exemple, incendier les tonneaux d’explosifs, à condition d’être hors de leur portée. Vous pouvez néanmoins toujours foncer dans le tas grâce au système de combat classique de la série. Il n’a pas changé, à exception d’un bullet time qui s’active si vous le souhaitez après une esquive.
Cette approche mesquine est également idéale face à un autre élément tout nouveau dans la série et emprunté à Fire Emblem (qui ironiquement le perd au passage) : les armes qui se cassent ! Vous ne ferez plus tout le jeu avec la même épée qui changera de skin à un moment, mais en amassant tout ce qui peut traîner par terre. Des haches, massues et même de simple branches d’arbres. Le jeu se moque d’ailleurs du symbole de l’épée de légende dès le début de la démo en proposant juste à côté de la grande église une épée plantée dans une roche, à la manière d’Excalibur. En la retirant, vous constatez qu’il ne s’agit que d’une arme rouillée qui ne pourra encaisser que deux, trois coups avant de se briser. Aucune des armes que j’ai pu voir dans cette démo ne dépassaient les dix points de « vie », cela vous force non seulement à économiser vos coups et ne pas y aller à la sauvage, mais aussi à profiter d’une grande variété d’armes et ainsi que d’approches différentes. Sans parler qu’en dehors du combat, celles-ci permettent diverses choses. Une massue en bois pourra plus facilement se transformer en torche, mais sera inutile pour couper du bois par exemple, il vaut mieux privilégier la hache.
La grande variété a cependant un défaut, celui d’une appréhension pas forcément évidente. Il y a trop de menus, trop d’inventaires, trop de boutons. Par exemple, vous avez l’inventaire des objets, des arcs, des armes, mais aussi, plus classique, du menu pause avec les fringues, les objets et compagnie. Se souvenir de comment accéder à tel ou tel inventaire est loin d’être évident parce qu’en fait, rare sont les jeux à ce servir de tous les boutons du Gamepad, ce qui est le cas ici.
Avec ce Zelda Breast of the wild, Nintendo, qui ne s’en cache pas, à absorbé et digéré une grande partie des jeux à succès de ces dernières années et en partie les jeux à mondes ouverts, tels que Skyrim, The Witcher ou, plus proche, Xenoblade. Tous ont été salué pour leurs qualités et, si ces jeux doivent beaucoup à Zelda, cet épisode Wii U/NX tente de reprendre la couronne de la liberté de jeu. La série de Nintendo s’était jusqu’à présent enfermée dans un dirigisme trop prononcé (le point culminant étant Skyward Sword) et il est bon de voir Zelda retrouver le chemin de la découverte et de la progression à l’envi. Si aller trop loin nous fera tomber face à un boss qui nous écrasera comme une mouche ou dans une région montagneuse où l’on mourra de froid faute de vêtements adaptés, soit. C’est ça l’aventure, la découverte !
Zelda vs Xenoblade
S’il y a une série qui a su donner quelques leçons à l’équipe Zelda ces dernières années, c’est bien Xenoblade. Un RPG proposant d’immenses régions à parcourir et dont beaucoup d’éléments ont atterri dans ce dernier Zelda. Une plaine d’Hyrule plus grande que jamais, où il est possible d’aller n’importe où, des monstres très puissants qui se baladent tranquillement sans ressentir le besoin d’aller au plus profond d’une grotte ou au sommet d’une tour à ne rien faire, une multitudes de machins à ramasser à droite et à gauche pour faire des potions, etc.
Cependant, en l’état actuel des choses après cette démo, Zelda Breath of the Wild est loin de proposer le même émerveillement ni le même génie. Certes, les deux séries sont différentes. Xeno est un RPG. Les combats, bien qu’en temps réel, se déroulent via un menu, l’approche est plus « fonce dans le tas » et les héros disposent de multiples coups spéciaux grâce à leurs épées lasers et fusils nucléaires. Il y a peu, voire pas d’énigmes, et l’action est plus speed que dans un Zelda. C’est en revanche sur leur point commun que le bât blesse pour Zelda, celui du monde ouvert. D’un point de vue technique pour commencer. Même si on part du principe que l’approche japanim est due à une direction artistique définie et non à une facilité technique, le framerate n’est, pour l’instant, pas au niveau des standards habituels de Nintendo en terme de fluidité et ce de manière assez régulière. L’horizon est également assez vilain de manière générale alors que le jeu fait des prouesses dans des environnement plus ou moins clôt comme les forêt par exemple. En bref, niveau graphismes et technique, c’est assez inégal et on est loin de la prouesse de Xenoblade X à ce sujet.
Malheureusement, c’est aussi sur le point des décors que le jeu pêche et c’est en soit bien plus inquiétant que quelques soucis techniques qui seront sûrement de l’histoire ancienne lors de sa sortie sur NX. Le jeu est artistiquement très réussi pour quiconque aime l’esthétisme japonais, rien à redire la-dessus. Le soucis, c’est que les soi-disants 2% de jeu que montre cette démo n’ont rien de visuellement intéressant à voir. Ce qui a fait le sel de tous les explorateurs en herbe de Xenoblade, ce sont bien les panoramas incroyables qu’il offre et qui récompense le joueur de son exploration, bien plus que la simple carotte du coffre avec la super épée.
Ici, il n’y a rien de tout ça, les décors sont trop basiques et il manque le côté incroyable des environnements des jeux de Monolith, comme ce gigantesque arceau planté au milieu du désert d’Oblivia ou les fleurs gigantesques de Noctilium. A mon avis, la comparaison entre ces deux titres se fera en particulier sur ce point. La série Zelda n’a jamais manqué de coins et recoins à explorer pour en sortir des quarts de cœur et autres rubis, mais ses environnements n’ont jamais impressionné autant que les panoramas visibles dans des jeux comme The Witcher ou même Batman Arkham Knight, qui offre une vue incroyable de Gotham sous la pluie. Il manque cette extravagance dans les décors et l’intérêt d’un monde ouvert réussi est là : il donne envie d’être parcouru juste pour observer la beauté d’un monde fantasmé que l’on ne verra nulme part ailleurs.
Si Breath of the Wild ne propose pas ça, l’exploration n’aura aucun intérêt et malheureusement, la démo ne propose rien de tel.
Open your eyes
Passé ce petit paragraphe très personnel, il faut quand même reconnaître que la proposition d’un Zelda qui veut se redéfinir, ou du moins se moderniser, est alléchante. De ce point de vue, la démo montre un grand potentiel car personne n’y fera la même chose, d’où les stream de plusieurs heures organisés par Nintendo, absolument nécessaires pour se rendre compte de toutes les possibilités offertes par le jeu. Lors de cet E3, Nintendo a mis l’accent sur le gameplay et uniquement là-dessus. Le but était de montrer l’immensité du monde, comment Link y évolue et toutes les nouveautés qui sont proposées. Tout ce qui concerne le scénario a été retiré, seul demeure quelques bribes de ce que l’on suppose être le début du jeu. Il faudra surement attendre encore quelques mois pour avoir les premières vidéos « Story Trailer ».
Ce Zelda a du potentiel. Il peut être exceptionnel, comme complètement raté et pour l’instant, il est assez dur de s’en faire une idée précise sur cette démo qui en montre peu. Comme si Nintendo nous proposait une super voiture tout terrain, toute équipée, sans nous dire si on roulera sur la cordillère des Andes ou sur le périph’ parisien. S’il s’agit de la première, ce Zelda Breath of the Wild pourrait bien être une sacrée expérience !